eArchivage électronique : une avancée législative nécessaire qui arrive au bon moment

Après plusieurs années de discussion, le projet de loi sur […]

March 14, 2013

Après plusieurs années de discussion, le projet de loi sur l’archivage électronique et un projet de règlement grand-ducal ont enfin été adoptés. Les projets de loi et de règlement grand-ducal adapteront les règles luxembourgeoises existantes, pourtant fort innovatrices lors de leur adoption en 1986 (!), quant aux conditions d’équivalence de preuve entre un document original (sur papier) et sa copie électronique (ou par micrographie).

Les désavantages du cadre juridique actuel relatif à l’archivage électronique …

Les règles actuelles n’ont malheureusement pas pu convaincre les entreprises de procéder en masse à une dématérialisation de leurs documents papier et de les détruire par la suite. Les principales raisons pour ne pas le faire sont les suivantes :

  • La loi semble donner une préférence à l’original sur papier. Le Code civil prévoit que l’original papier d’un contrat peut toujours être exigé lorsqu’il existe encore.
  • Les conditions d’équivalence de preuve entre original et copie sont difficiles à respecter. Par ailleurs, elles ne correspondent plus à certaines pratiques modernes de dématérialisation et de conservation de documents (et plus particulièrement la condition que l’enregistrement de la copie devrait entraîner une “modification irréversible du support“).
  • Last but not least, une entreprise se prévalant de l’équivalence de preuve entre l’orignal et une copie doit être à même de démontrer le respect des conditions d’équivalence.

… seront supprimées par les règles proposées …

Les propositions de loi et de règlement grand-ducal répondent de manière adéquate aux problèmes soulevés :

  • L’exigence de la production de l’original d’un contrat en version papier si celui-ci existe encore, est aboli.
  • Les conditions d’équivalence de preuve ont été modernisées. Ainsi et à titre d’exemple, les supports de conservations peuvent être modifiés après l’enregistrement de la copie (évidemment à condition que la copie elle-même reste intacte).
  • Les conditions d’équivalence sont présumées être remplies et la charge de la preuve est donc renversée si recours est fait à une entreprise qui a été certifiée comme “prestataire de services de dématérialisation et/ou de conservation” (PSDC) par un certificateur (accrédité par l’OLAS) et qui a été approuvé en tant que tel par l’ILNAS.

Les règles proposées constituent, dès lors, une réelle avancée par rapport au cadre juridique actuel.

… qui arrivent au bon moment …

Même s’il est (désespérément) attendu depuis des années, le projet de loi n’a pas été adopté trop tard. En effet, ce n’est que ces dernières années que le Luxembourg s’est doté d’une réelle infrastructure adéquate pour héberger une masse critique de documents dématérialisés et d’assumer le rôle d’un e-archiving hub.

De plus, le projet de loi a pu intégrer des évolutions récentes du cadre normatif de l’Union européenne (UE) quant la certification de services tels que les services de dématérialisation et de conservation.

Finalement, la Commission européenne a lancé récemment une proposition de règlement UE qui, une fois adoptée, prescrira qu’un document électronique est équivalent à un document imprimé et recevable comme preuve en justice au sein de l’UE si l’authenticité et l’intégrité sont garanties. D’un côté, cela résoudrait, en tout cas dans un contexte intra-UE, le problème potentiel de la valeur probante à l’étranger d’une copie réalisée et conservée conformément aux règles luxembourgeoises. D’un autre côté, maintenant que le principe de l’équivalence entre un document électronique et une version originale sur papier est en voie d’acceptation à l’échelle européenne, c’est le moment idéal pour le Luxembourg de prendre le rôle de précurseur pour construire un savoir-faire et un écosystème quant aux méthodes et aux solutions qui répondent aux exigences d’authenticité et d’intégrité.

… mais qui sont certes perfectibles sur plusieurs points.

Comme déjà dit, les règles proposées constituent une avancée indéniable, mais elles sont perfectibles et devraient être modifiées sur plusieurs points avant qu’elles ne puissent réellement convaincre les entreprises de s’orienter vers la destruction en masse de la version papier de leur patrimoine informationnel.

Tout d’abord, les règles en question ne semblent concerner que les “actes sous seing privé” (= contrats) au sens du Code civil et les pièces comptables qu’une entreprise est obligée de conserver en vertu des dispositions du Code de commerce (plus particulièrement les factures entrantes et sortantes et toutes les autres pièces justifiant des écritures comptables). Il ne semble donc pas que les règles visent tous les documents papiers qui ont une importance pour l’entreprise et qui sont susceptibles d’avoir une valeur probante, par exemple dans le cadre d’un contentieux. De plus, il aurait été utile de confirmer l’équivalence des copies électroniques vis-à-vis les administrations et autorités publiques.

Une autre problématique, qui pourra certainement encore être résolue lors de la suite du processus législatif, est celle du sort des documents dématérialisés lorsque le statut PSCD du prestataire ayant effectué la dématérialisation a été suspendu ou retiré par l’ILNAS suite à une faille dans la procédure de dématérialisation.

Carte Blanche edited by Vincent Wellens, Head of IP/ICT & Competition at NautaDutilh
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