Appréhender le digital, pour éviter d’être mis au ban de son propre marché

Le digital transforme des modèles économiques éprouvés dans tous les métiers, pour tous les secteurs. Chaque acteur économique serait donc bien avisé de mieux appréhender les changements, de s’inscrire dans un processus de transformation continu. Afin d’éviter de se faire « ubériser »...

July 6, 2015

Le digital transforme des modèles économiques éprouvés dans tous les métiers, pour tous les secteurs. Chaque acteur économique serait donc bien avisé de mieux appréhender les changements, de s’inscrire dans un processus de transformation continu. Afin d’éviter de se faire « ubériser »…

Par Sébastien Lambotte pour l’édition ITnation Mag Printemps 2015

Au sein de l’ère digitale dans laquelle nous vivons, tout acquis ne le reste jamais bien longtemps. Le numérique transforme nos vies au quotidien. S’il n’est pas toujours évident de déterminer si c’est pour un mieux, la technologie contraint les acteurs de la société, dans leur grande diversité, à s’adapter en permanence. « Les usages du mobile, l’importance grandissante des médias sociaux, la valeur croissante de la donnée, la virtualisation des infrastructures et le Cloud ont des impacts conséquents sur les modèles économiques et opérationnels, commente Olivier Maréchal, Partner, à la tête du département Advisory pour le secteur financier chez EY Luxembourg. Aujourd’hui, les entreprises peuvent s’affranchir de nombreuses contraintes physiques. Le digital réduisant les barrières à l’entrée sur tout marché, de nouveaux acteurs émergent, bousculant les forces en présence. »

« Les enjeux concernent donc tous les acteurs, quel que soit l’environnement économique dans lequel ils évoluent. »

Les exemples ne manquent pas. Prenons le secteur financier. De jeunes entreprises développent des services innovants, en matière de paiement avec le eWallet ou d’autres plateformes de paiement en ligne, ou de financement avec le « crowdfunding ». D’autres sont actives dans l’émission et la gestion de monnaies virtuelles. Pour les banques dites traditionnelles, ces évolutions induisent tant des risques que des opportunités, pour peu qu’elles soient en capacité ou non de s’adapter. Ce phénomène ne s’applique pas uniquement à la finance, si chère au Luxembourg. Tous les domaines économiques sont touchés par des changements de modèle. Airbnb est devenu le plus grand fournisseur
de logements au monde, alors qu’il ne possède aucun bien immobilier. Facebook est le média le plus populaire…

Le géant de Palo Alto ne crée pourtant aucun contenu. Uber est devenue la plus grande compagnie de taxis de la planète sans posséder de véhicules ni salariés de taximen. « Les modèles changent et il faut que les entreprises se posent les bonnes questions, au risque de voir leur business se faire, selon l’expression désormais consacrée, “Ubériser” », commente Olivier Maréchal.

Rapprocher le client de l’entreprise, gagner en productivité

Le digital induit de profondes transformations. Il impacte les business models, aussi bien dans le monde technologique que dans des secteurs plus traditionnels, dont le modèle était pourtant rôdé depuis plusieurs décennies. « Les enjeux concernent donc tous les acteurs, quel que soit l’environnement économique dans lequel ils évoluent. Et le Luxembourg n’est évidemment pas épargné. En négligeant ces aspects, sans entamer de réflexion autour des enjeux digitaux, sans se doter d’une stratégie numérique, on peut se retrouver off-business, mis au ban de son propre marché, en seulement quelques années, précise Olivier Maréchal. Malheureusement, on constate aujourd’hui que la grande majorité des acteurs, au Luxembourg, manque encore de maturité par rapport à ces enjeux. »

La technologie a ouvert le champ des possibles. « Le digital permet notamment de rapprocher l’entreprise du client, de mieux comprendre ce dernier et, de ce fait, réduire le cycle vente/achat, précise Brice Lecoustey, partner, à la tête du département Advisory pour le secteur commercial et public chez EY Luxembourg. D’autre part, le digital est aussi un vecteur d’amélioration de la productivité. Il permet d’opérer à moindre coût et d’améliorer les processus, de les automatiser, de les rendre plus intelligents. Au final, c’est l’expérience utilisateur, facteur clé de l’économie moderne, qui doit en sortir grandie. »

Anticiper les changements, faire la différence

Chaque acteur, dans la sphère privée comme publique, devrait envisager l’évolution de son business à moyen terme en considérant les évolutions technologiques, la manière dont le digital transforme la société, impacte le comportement des consommateurs et des citoyens que nous sommes. « Il faut se poser quelques questions essentielles, précise Brice Lecoustey. Dans quelle mesure mon business model pourrait être impacté ? Mais aussi comment, à mon échelle, pourrais-je profiter des opportunités créées par le digital ? En matière d’expérience utilisateur, il faut se demander comment investir l’univers du client avec la volonté de mieux vendre des produits et services. Le digital permet à de nombreuses
marques d’être présentes bien en amont de la consommation du produit ou de l’acte d’achat. » Par exemple, Nike est devenu un partenaire du bien-être de ses clients, en développant notamment des applications qui nous invitent à courir, à mieux bouger, pour mieux proposer des chaussures adaptées à un moment donné.

Exploiter la valeur de la donnée, la sécuriser

« Aujourd’hui, la technologie, avec une meilleure exploitation des données, permet d’anticiper les besoins du client, de faire preuve de proactivité », ajoute Brice Lecoustey.
Ces enjeux ne peuvent être évoqués, toutefois, sans considérer les problématiques inhérentes au traitement et à la protection des données personnelles. Si le consommateur veut bénéficier d’une meilleure expérience, il tient aussi à ses données personnelles, principalement en Europe. « Si une meilleure exploitation de la donnée présente de grandes opportunités, l’entreprise qui s’inscrit dans un tel schéma ne doit donc pas négliger les questions de sécurité et de gestion de l’information sensible et les aspects réglementaires en discussion, notamment au niveau du législateur européen », précise Brice Lecoustey.

Les médias sociaux ont aussi révolutionné la manière dont on communique avec le consommateur. Ils ont renversé les approches marketing traditionnelles. Via ces réseaux, désormais, le consommateur s’exprime, évalue, commente, compare. Le modèle TripAdvisor a tendance à se développer pour tous les secteurs d’activité. Face à ces nouveaux enjeux, l’objectif marketing est désormais de pouvoir établir une relation de confiance, durable, entre le consommateur et la marque. Les médias sociaux doivent être exploités dans cette perspective.

Vers des processus plus intelligents

La transformation des processus est l’autre grande opportunité digitale. Des processus plus performants contribueront évidemment à l’amélioration de l’expérience client. Le digital, à ce niveau, doit permettre de gagner en efficacité et en productivité, ainsi que sur les coûts opérationnels. « Pouvoir offrir des services en temps réel, comme le souhaitent de plus en plus les utilisateurs, exige évidemment d’adapter ses processus, de disposer d’une capacité de gestion en lien avec ses nouvelles ambitions », précise Brice Lecoustey.

S’adapter, dans un monde en transformation, demande de repenser le mode de fonctionnement de l’entreprise, de revoir chacun de ses processus en considérant les évolutions technologiques. « Le digital permet aujourd’hui de mieux accompagner les processus, le contrôle et l’analyse de ceux-ci. L’externalisation et l’automatisation entraînent aussi des adaptations au niveau de la gestion des ressources humaines. Digitalisation n’est pas synonyme de destruction d’emplois. Au contraire, elle doit permettre d’en créer de
nouveaux, de faire évoluer les compétences vers la création de plus de valeur ajoutée.

« Pouvoir offrir des services en temps réel exige d’adapter ses processus et de disposer d’une capacité de gestion suffisante. »

A ce titre, le digital exige une montée en compétences, commente Olivier Maréchal. Pour un relationship manager, le digital doit permettre d’être plus proche du client. Un opérateur, lui, aura tendance à se positionner comme un accompagnateur de processus, avec pour objectif de s’assurer de son bon accomplissement et de l’améliorer. »

Il n’est toutefois pas évident de se positionner face à ces enjeux. Comment investir ? Dans quelle mesure ? Sur quelle technologie miser ? Comment se transformer ? Où placer le curseur ?

« Aujourd’hui, nous accompagnons de nombreuses entreprises face à ces enjeux, afin qu’elles les appréhendent de la meilleure des manières. Certes, il faut investir. Cela dit, les technologies sont aujourd’hui plus accessibles que par le passé », explique Olivier Maréchal. « Cela dit, le premier enjeu de transformation ne réside pas forcément dans la technologie, mais plus dans la culture de l’entreprise. Les entreprises, face aux évolutions actuelles doivent avant tout devenir plus agiles, permettre l’émergence d’idées et faciliter le développement de projets innovants », poursuit Brice Lecoustey. Devenir digital friendly, donc, c’est avant tout développer un état d’esprit tourné vers l’innovation et le changement.

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