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Les données Facebook ont-elles permis à Trump de gagner ?

Facebook se retrouve au cœur d’un scandale lié à l’exploitation des données personnelles de ses utilisateurs. L’entreprise Cambridge Analytica aurait en effet utilisé, sans leur consentement, les data de millions de personnes afin d’influencer la campagne électorale de Donald Trump.

March 20, 2018

Quatorze ans après sa création, Facebook est certainement en train de vivre l’un des moments les plus difficiles de son histoire, après les révélations faites samedi par les journaux The Observer (The Guardian) et New York Times.

Prédire et influencer les opinions politiques au départ de la data

La société Cambridge Analytica, active dans la campagne électorale de Donald Trump en 2016, est accusée d’avoir utilisé, à leur insu, les données personnelles de quelque 50 millions d’utilisateurs du réseau social afin de déterminer et d’influencer leurs intentions de vote, via de la publicité ciblée en faveur du candidat républicain.

Sur base de ces informations, la société aurait réalisé un profilage complet de la population adulte américaine. « Nous avons utilisé Facebook pour récolter des millions de profils de gens. Et construit des modèles pour exploiter ce que nous savions d’eux et cibler leurs démons intérieurs. C’est la base sur laquelle a été construite toute l’entreprise », a expliqué Christopher Wylie, le lanceur d’alerte, dirigeant de la société Eunoia Technologies et ancien employé de Cambridge Analytica.

L’entreprise britannique était alors dirigée par Steve Bannon, devenu le directeur exécutif de campagne de Donald Trump, puis l’un de ses proches conseillers à la Maison-Blanche avant d’être limogé en août 2017.

Un transfert de données illégal

Spécialisée dans l’analyse et l’exploitation de données, Cambridge Analytica aurait récupéré ces précieuses informations via une application de tests de personnalité « thisisyourdigitallife », présentée comme « une application de recherche utilisée par les psychologues » et proposant de rémunérer les utilisateurs pour remplir ces questionnaires.

Entre 2013 et 2015, l’application a ainsi été téléchargée par 270.000 usagers de Facebook, en toute légalité, « mais elle a aussi collecté les informations des amis des personnes effectuant les tests, permettant d’accumuler des données sur des dizaines de millions de personnes », a indiqué The Observer. À l’époque, les applications Facebook pouvaient en effet accéder aux profils des amis dont les réglages de vie privée le permettaient.

C’est donc en transmettant ces data à Cambridge Analytica à des fins électorales, et non pas en les récoltant, que le créateur de l’application, le psychologue russe Aleksandr Kogan, a entravé les règles du réseau social. Facebook, qui avait découvert ce transfert de données en 2015, avait alors supprimé l’application et exigé la destruction de toutes ces données. Ce qui n’a, visiblement, pas été le cas.

« Ces plateformes ne peuvent se réguler elles-mêmes »

À l’heure où le GDPR doit bientôt entrer en vigueur, ces révélations ont suscité de vives inquiétudes des deux côtés de l’Atlantique. C’est le cœur du modèle économique de Facebook et la protection des données de ses utilisateurs, déjà régulièrement remise en cause, qui se voient ainsi ébranlés.

« C’est une brèche énorme sur laquelle il convient d’enquêter. Il est évident que ces plateformes ne peuvent se réguler elles-mêmes, a déclaré Amy Klobuchar,  sénatrice démocrate américaine, via son compte Twitter. Mark Zuckerberg doit être auditionné par le Sénat. »

Les autorités européennes, à travers les déclarations de Věra Jourová, Commissaire Européenne en charge de la protection des données personnelles, ont elles aussi réagi. Elle a qualifié cette affaire d’ « effroyable si elle était confirmée » et a indiqué qu’elle allait demander des clarifications à Facebook.

Facebook chute en Bourse

En attendant les résultats de l’enquête, Facebook a suspendu les accès à leur compte à Strategic Communication Laboratories (SCL), la maison-mère de Cambridge Analytica, ainsi qu’à Aleksandr Kogan et Christopher Wylie.

Dès l’ouverture de Wall Street ce lundi, Facebook a dégringolé. Le géant des réseaux sociaux a connu sa pire journée en plus de cinq ans. En fin de journée, son action avait perdu 6,8 %, soit plus de 30 milliards de dollars de valorisation.

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