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Le développement d’une activité FinTech au Luxembourg est l’un des piliers de la stratégie du gouvernement. Dans ce contexte, la technologie ne doit plus se contenter de supporter l’activité financière. Elle doit être envisagée comme un des principaux leviers de développement pour la Place financière.

March 5, 2015

Le développement d’une activité FinTech au Luxembourg est l’un des piliers de la stratégie du gouvernement. Dans ce contexte, la technologie ne doit plus se contenter de supporter l’activité financière. Elle doit être envisagée comme un des principaux leviers de développement pour la Place financière.

Par Sébastien Lambotte.

Au cœur de la stratégie Digital Lëtzebuerg, un groupe de travail FinTech va se pencher sur la manière dont les ressources et compétences technologiques dont dispose le Luxembourg pourraient mieux servir la finance. Réunis autour de Nicolas Mackel, CEO de Luxembourg for Finance, les représentants du secteur financier ainsi que ceux du secteur ICT seront invités à alimenter la réflexion permettant de mieux envisager les chantiers de demain. « Dans un premier temps, il faudra établir un état des lieux des besoins actuels de la Place financière en matière de technologie ainsi que de ceux à venir, afin de pouvoir déterminer ce qu’il faut mettre en œuvre pour que tous puissent être pourvus, explique Nicolas Mackel. Actuellement, si le secteur financier peut déjà s’appuyer sur des société actives dans la FinTech, à l’avenir il devra aussi compter sur des start-ups développant des solutions innovantes au service du développement de la finance au Luxembourg et au-delà. »

Jusqu’à présent, le secteur ICT luxembourgeois est essentiellement venu en support, répondant aux besoins des acteurs financiers de la place. Toutefois, dans un environnement où le digital gagne toutes les couches de l’organisation, on comprend aisément l’opportunité qu’il y a à mieux appréhender la manière dont la technologie peut davantage servir un des piliers des l’économie luxembourgeoise. « Une de nos missions sera effectivement de déterminer comment l’innovation technologique peut servir le développement de la place financière, poursuit le CEO de Luxembourg for Finance. Quand on considère la manière dont le Big data, les solutions d’e-payment, les plateformes peer-to-peer, la monnaie virtuelle… transforment les modèles d’affaires. Il est important d’identifier les technologies qui peuvent être utiles à la finance, de voir comment développer de nouvelles activités autour de ces innovations. »

Pour débuter ce travail, il faudra bien définir ce que l’on entend par activités FinTech à développer. Jusqu’à présent, les acteurs de la finance allaient le plus souvent chercher des réponses à leurs besoins à l’étranger. L’activité FinTech luxembourgeoise se limitant généralement à adapter des solutions ou des plateformes aux spécificités locales. « On peut cependant nourrir d’autres ambitions, affirme Jean Diederich. Le souhait du gouvernement de permettre à ce secteur de se développer est cohérent. Nous disposons au Luxembourg, d’une part, d’une activité financière reconnue à travers le monde et, d’autre part, de compétences technologiques avancées. A partir de là, on peut envisager de belles choses. Demain on peut très bien imaginer que les solutions utilisées par le secteur financier, plutôt que d’être importées, pourraient être développées au Luxembourg. »

Le défi est de taille. Le relever nécessitera de rapprocher les acteurs technologiques de ceux actifs dans la sphère financière, afin de développer des projets communs de R&D. Il faudra, par ailleurs, travailler sur les deux autres piliers de la stratégie Digital Lëtzebuerg, à savoir le développement des compétences technologiques en phase avec les nouveaux besoins, ainsi que l’attraction des start-ups. « On ne peut pas résumer la FinTech à quelques start-ups et à des softwares. On parle ici d’un écosystème qui doit se mettre en place et pour lequel doit s’opérer un changement de mentalité, une plus grande cohésion entre les développeurs de solutions et les acteurs des métiers de la finance, afin de permettre à des approches disruptives et créatrices de nouvelles opportunités d’émerger », explique Jean Diederich. Cela ne serait évidemment pas réalisable en un claquement de doigt. Toutefois, au vu des enjeux, considérant la vitesse à laquelle l’activité financière se transforme, s’atteler à un tel chantier apparaît aujourd’hui comme essentiel pour l’avenir de l’économie luxembourgeoise. « L’ambition est grande, dans la mesure où il faut développer des activités innovantes pouvant mieux garantir l’avenir de la Place financière, lui donner de nouvelles perspectives, précise Nicolas Mackel. Aujourd’hui, la technologie sous-tend toute activité financière, permettant du simple transfert d’argent, ouvrant la voie à de nouvelles activités comme on peut le voir avec l’émergence du bitcoin. Le digital, aujourd’hui, peut bouleverser l’activité financière. Au Luxembourg, compte tenu de l’importance de la finance dans l’économie, nous ne pouvons pas nous permettre de louper le coche. Il faut que nous disposions de toutes les clés pour permettre aux acteurs de la finance d’évoluer.»

Le chantier peut s’avérer vaste, tant les innovations technologiques se multiplient. Ces dernières années, le Luxembourg a vu naître plusieurs acteurs développant des activités dans le paiement mobile, l’e-wallet ou des plateformes de paiement en ligne avec de plus ou moins grandes ambitions. Des plateformes de peer-to-peer lending ou de crowdfunding émergent partout à travers l’Europe. Les acteurs traditionnels de la finance sont confrontés à des enjeux d’intermédiation. D’autre part, les technologies de business intelligence, de type analytics ou big data, pourraient permettre à de nombreux acteurs de trouver d’autres relais de croissance, d’appréhender le marché de manière plus dynamique. La transformation digitale au sein de la sphère financière est de nature à améliorer les processus et leurs performances à tous les étages et à apporter de nouvelles réponses aux enjeux de sécurité. « Chaque métier et acteur de la finance peut trouver de nouvelles opportunités à travers les évolutions technologiques », précise Nicolas Mackel. « Mais il faut que tous puissent en prendre conscience et s’investissent dans cette voie avec les acteurs ICT innovants qui peuvent les aider. »

Cela dit, vu le champ des possibles, il n’est pas évident de déterminer par où commencer. Comme le Luxembourg l’a souvent démontré par le passé, n’est-il pas préférable d’exceller dans un nombre limité de domaines que de diluer l’effort avec le désir de tout embrasser ? « On ne pourra pas mener toutes les batailles », précise Jean Diederich. « Le Luxembourg peut devenir une plateforme émettrice de technologies FinTech. Je pense toutefois que pour y arriver, il faut identifier des niches à partir desquelles nous serons en mesure de faire la différence et de concentrer nos efforts dessus. Cette stratégie a plutôt bien réussi au Luxembourg jusqu’ici. »

Le consultant de Kurt Salmon pense, personnellement, que le Luxembourg peut exceller dans le domaine des paiements, de la distribution de fonds, dans le développement de technologies au service d’une meilleure gestion des risques et de la fraude, autour des enjeux de la désintermédiation… L’autre enjeu sera de toujours mieux accompagner les acteurs de la finance existants, pour qu’ils s’adaptent, se transforment et innovent grâce au digital, que la technologie soit née au Luxembourg ou ailleurs.

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