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Télécom: l’inévitable Pascal Koster

Avec Claude Lüscher (Exigo et Tecsys IT-Haus) et Frank Fischer (IT […]

April 25, 2013

Avec Claude Lüscher (Exigo et Tecsys IT-Haus) et Frank Fischer (IT works,…), le bouillonnant Pascal Koster, ex-CTO de Mobistar (groupe Orange / France Télécom), revient à Luxembourg pour lancer Join Wireless, ont dévoillé nos confrères de Paperjam. Retour sur la Koster-story…

L’histoire de Pascal Koster dans le monde de la télécom, quand commence-t-elle ?

C’est une bonne question… (rires). Cette histoire, elle commence sur les bancs de l’université de Zurich en fait… De formation, je suis ingénieur en télécommunications, mais j’ai toujours été attiré plus particulièrement par le monde du mobile. J’ai débuté ma carrière professionnelle chez Cegedel à Luxembourg, dans le cadre de cette volonté qu’avait l’opérateur d’énergie à se diversifier dans la télécommunication. Nous travaillions avec sa filiale Cegecom sur un dossier de licence GSM 2G, avec des filiales de Mannesmann et SFR. Finalement, cette licence a été attribuée à Millicom ; un dossier porté par Jean-Claude Bintz.

Puis a débuté l’aventure Tango…

En effet, j’ai rejoint Jean-Claude Bintz en octobre 1999 qui m’avait engagé en tant que directeur commercial de Tango. Trois mois plus tard, je suis devenu le directeur général de l’opérateur alors que Jean-Claude Bintz en était l’administrateur délégué en plus d’un rôle à l’international au sein du groupe Tele2, le propriétaire de Tango…

Quelle aventure ! Nous avons débuté avec de nombreuses épines dans le pied et nous avons, petit à petit, résolu des problèmes de réseau, de facturation, etc. Nous avons finalement réussi à avoir un réseau compétitif vis-à-vis de celui de l’incumbent (1) : LuxGsm. Et même de le surpasser rapidement… D’un point de vue technologique, par exemple, nous avons été les premiers à disposer de l’High Speed Mobile Data. Nous avons toujours eu cette volonté de nous différentier par l’introduction de l’innovation très rapidement. Finalement, je crois désormais que cela fait partie de mes traits de caractère encore aujourd’hui : j’ai toujours envie d’être dans le groupe de tête…

(1) Incumbent : opérateur télécom historique, soit les P&T à Luxembourg et sa filiale mobile LuxGsm

Cette volonté d’innovation a en effet toujours été portée en avant dans vos choix…

Oui, et il a fallu innover tout le temps… Je me souviens d’une publicité dans laquelle on vantait la « qualité de la voix digitale » sur notre réseau. Nous avons aussi été les premiers à tenter de mettre de la data sur notre réseau puis finalement à construire un réseau UMTS à Luxembourg, faisant de nous le troisième ou le quatrième opérateur à disposer d’un réseau 3G en Europe… Je me souviens aussi que nous avons dû aller chercher nos premiers terminaux en Italie, car personne ne les importait jusqu’ici… C’était une belle époque de challenges…

Aviez-vous un soutien marqué de votre groupe pour relever ces défis ? Il n’y avait pas de complexe luxembourgeois à cette époque…

Nous avions un bon soutien de la part de Tele2 dans nos ambitions à être en avant-phase. Et en effet, avec la mentalité d’entrepreneur de Jean-Claude Bintz, nous n’hésitions pas à embrasser des nouvelles opportunités et même à créer des nouveaux besoins. C’est vrai qu’il y avait une forte demande pour la partie voix sur le mobile. Et, rapidement, on a eu la volonté de développer des services tout autour…

Jusqu’à la création de Vox Mobile…

Oui. Après avoir relevé avec succès les différents défis de Tango, nous nous sommes lancés, dès 2003, dans le projet Vox Mobile, un projet basé exclusivement sur l’opportunité du 3G. C’était là aussi assez novateur sur le marché. Nous avions signé en outre un accord de MVNO(1) avec l’incumbent dès 2003.

(1) MVNO : Mobile Virtual Network Operator

Vox Mobile misait donc sur le potentiel de l’UMTS ?

Nous avions une stratégie purement 3G, car nous estimions qu’il était inutile de construire un réseau 2G, promis – pensait-on – à disparaître… Aujourd’hui, on voit que la 2G n’a pas rendu les armes. Certes elle n’était pas indispensable, mais il y avait là des opportunités à améliorer notre couverture par du 2G.

Il faut dire que nous étions soutenus par les demandes d’opérateurs étrangers qui voulaient trouver un troisième opérateur luxembourgeois sur le marché du roaming. In fine, même si nous n’avions pas nécessairement un besoin national d’avoir un réseau « G propre– en raison de notre accord avec LuxGsm -, il y avait une necessité sur le marché international d’avoir trois opérateurs actifs 2G et 3G à Luxembourg.

Quelles sont vos satisfactions dans le projet Vox Mobile ?

Une des grandes success stories dans l’histoire de Vox Mobile, a été la vitesse à laquelle nous avons réussi à implémenter le projet : soit un peu moins de six mois ! Nous avions réussi à mettre en place une partie du réseau 3G, le système de facturation complet et même SAP en tant qu’ERP en moins de huit semaines ! À l’époque, SAP nous avait affirmé que nous détenions le record de l’implémentation la plus rapide de leur solution… Nous utilisions aussi, un système de recouvrement d’impayés et un système de caisse, tous deux intégrés dans SAP… Je dois dire que nous étions très visionnaires sur la vue 360° du client…

Aussi, le choix de notre plateforme de billing – fonctionnellement très bien à cette époque – nous a surtout permis de conclure des accords de roaming très rapidement avec des opérateurs étrangers. C’est notamment pour cette raison que nous avons réussi à conclure des accords d’itinérance 3G avec d’autres opérateurs ; bien plus vite que nos concurrents. Cela nous a donné un avantage significatif sur ce segment.

Et aujourd’hui, je constate aussi que la façon dont nous avons adressé le marché Corporate – avec un service plus proche du client professionnel -, nous a également été bénéfique. Vox Mobile, maintenant Orange Luxembourg, est devenu un opérateur privilégié pour le B2B… Cela était étonnant à l’époque. Généralement, lorsqu’un troisième opérateur arrivait sur un marché, il adressait d’abord le marché du prépayé et des clients privés. Nous avions fait le choix de porter notre attention au marché du post-payé – des abonnements – et même dans le segment plutôt haut de gamme et B2B. Aujourd’hui encore, nous disposons d’une clientèle majoritairement dans le post-paid…

En effet, cette stratégie du post-paid vous a permis d’afficher un ARPU (1) des meilleurs à Luxembourg…

(1) Average Revenue Per User : le chiffre d’affaires mensuel moyen réalisé avec un client

Effectivement, nous étions sur une stratégie de la valeur qui se mettait en œuvre principalement avec des packages tant pour les privés que pour les professionnels. Nous avions aussi gagné des grands comptes, des entreprises internationales,… notamment avec Mobistar en Belgique ou en collaboration avec la Freemove Alliance (à l’époque avec Deutsche Telekom et France Télécom) avec qui l’on répondait aux RFP’s internationaux.

Cela nous a permis de mettre l’accent pas que sur le prix, mais bien sûr la valeur apportée aux clients. Nous avons aussi toujours consenti beaucoup d’effort à améliorer la qualité, de façon constante. Comme il nous était difficile, en tant que nouvel opérateur, d’être le meilleur sur la dimension de la couverture, nous voulions d’autant plus être les meilleurs sur les services apportés…

En matière de nombre de clients, nous avons un calcul très strict, alors que le marché peu parfois faire un comptage très SIM-driven, qu’elles soient même actives ou non-actives.

Comment cette originalité se concrétisait-elle ?

Par exemple, pour nous différentier, nous avons lancé l’Unified Messaging dès 2003, soit l’intégration des parties Voicemail, e-mail, MMS et SMS dans une seule interface web… Encore aujourd’hui, Orange est la seule à proposer l’intégration du Visual Voicemail avec l’iPhone. Ce qui démontre que nous n’avons eu cesse de travailler sur l’intégration des plateformes de services.

Vous communiquiez sur ces valeurs qui sont toujours les vôtres…

Oui. Nous savions créer le buzz ; c’est vrai. C’était dû aussi peut-être aux personnages (rires) ! Mais en-dehors du hype, il faut savoir aussi concrétiser. C’est ce que nous avons fait.

Il faut dire aussi que nous avons aussi complété nos offres par un portefeuille de services dans le fixe. Nous avons rapidement signé un accord Whole-Sales avec l’opérateur historique pour des services ADSL et la ligne fixe. C’est donc sous le nom de Vox Mobile que la première offre triple-play, notre All-in-One, est née à Luxembourg. L’opérateur historique n’a pas tardé à répondre avec son offre intégrale suite à notre proposition du tout-en-un. Je dois dire que nous nous sommes finalement un peu tiré une balle dans le pied, car l’incumbent était finalement mieux positionné que nous avec son réseau fixe évidemment. Nous n’avions pas mesuré que le bundling pour l’opérateur historique serait permis…

Comment s’est déroulée l’acquisition de Vox Mobile ?

Ce qu’il faut se remémorer, c’est que fin 2006, nous avons vu arriver une nouvelle réglementation au niveau du roaming qui allait nous frapper de plein fouet. Dans un petit pays comme Luxembourg, le roaming des abonnés étrangers qui communiquaient lors de leur passage à Luxembourg, représentait jusqu’à 25% de nos revenus. Nous avons donc envisagé l’opportunité de nous inscrire dans un grand groupe car nous étions convaincu que le roaming allait de plus en plus se jouer entre les partenaires opérateurs au sein d’un groupement.

D’un côté, il y avait les opérateurs Vodafone – initialement c’était LuxGsm qui était le partenaire de Vodafone, jusqu’au jour de la reprise de Tango par Belgacom – et de l’autre, Vox Mobile qui était proche de la Freemove Alliance avec Deutsche Telekom et France Télécom. On s’est dit qu’il y avait un risque, si on n’était pas plus fortement ancré dans un grand groupe, que les grandes alliances d’opérateurs nous évitent pour privilégier les deux autres opérateurs luxembourgeois.

C’est donc Mobistar qui a fait l’acquisition de Vox Mobile…

Nous savions que les cartes allaient être redistribuées auprès des opérateurs luxembourgeois. Le groupe Tele2 était en recherche d’une nouvelle opportunité pour plusieurs de ses filiales, dont Tango. Nous avons donc anticipé cette nouvelle définition du marché en nous mettant à la recherche d’un partenaire. Parmi les intéressés, nous avons privilégié le choix de Mobistar pour plusieurs raisons, dont les liens forts que Mobistar et nous avions étant donné que nous avons su remporter quelques grands clients communs sur le Belux et le fait que la maison-mère serait alors dans un pays voisin. Cela s’est concrétisé par la vente de 90% de Vox à Mobistar, l’opérateur belge filiale du groupe Orange, la marque de France Télécom ; les 10% restant étant conservés par Jean-Claude Bintz et moi-même.

De plus, France Télécom avait déjà tenté une approche sur le marché grand-ducal mais avait eu des difficultés à trouver son chemin sur un si petit pays que Luxembourg. Vox Mobile était la bonne voie pour eux…

La marque a été maintenue quelques temps puis Orange est devenue votre couleur préférée…

Oui, nous avons réfléchi à adopter le nom d’Orange après l’acquisition. Nous savions que la marque Orange avait une belle notoriété, notamment du côté du marché résidentiel français… Plus encore, nous avons remarqué que cette marque nous aiderait à progresser encore plus vite sur le secteur des entreprises. En adoptant la marque Orange, nous voulions aussi gagner en crédibilité pour concourir dans les très grands dossiers internationaux. Avec une marque internationale, cela était plus évident et efficace qu’avec une marque purement locale…

Nous avons donc rebrandé Vox Mobile en Orange Luxembourg, tout en conservant un caractère d’entreprise propre au pays. C’est une constante chez Orange de laisser les entités adapter leurs offres au contexte des pays dans lesquels elles se trouvent. Ainsi, nous n’avons pas d’offres standards du groupe à défendre, mais nous nous inscrivons bien dans une démarche d’adaptation du portefeuille de produits et services à la couleur luxembourgeoise. C’est aussi une des raisons qui a forgé notre décision pour aller vers Mobistar et donc Orange : la faculté et la liberté laissée aux filiales ; ce qui n’est pas toujours le cas avec d’autres grands opérateurs…

Nous étions convaincu par l’approche de Mobistar. Pour un entrant, on peut attaquer un marché en détruisant la valeur de ce marché. À la fin, casser les prix, ne servira à personne… car ce qui serait finalement détruit, c’est la qualité des réseaux. Ce que Mobistar a fait, après analyse de notre position, c’est de choisir d’investir à Luxembourg… C’est une toute autre démarche !

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